peut-on dire "allez vous faire foutre" aux bailleurs de fonds?

 

Siège du FMI à Washington D.C. (USA)

Je suis toujours autant amusé d’entendre les conneries habituelles sur la dictature imposée aux pays pauvres par le FMI, la banque mondiale, les pays riches etc.… comme quoi il suffirait de leur dire « allez vous faire foutre » pour claquer autant d’argent public que l’on voudrait, et prendre le train du développement. Non parce que…si une grande majorité de pays africains sont pauvres encore aujourd’hui, c’est le la faute aux bailleurs de fonds, et de leur aide au développement pas vraiment développeuse.

Le mot « bailleur de fonds » est trompeur, car trop vague. De plus, la plupart des africains ignorent les notions économiques de base, donc ignorent même les termes des accords signés par les dirigeants au moment de contracter les crédits. Combien de fois n’ai-je pas entendu certains africains accuser le FMI, la Banque mondiale, la Françafrique, de tous nos maux. Bah oui ! Comme si sans l’endettement, les choses iraient beaucoup mieux. C’est en partie vrai, mais pas totalement.

Comme quasiment tous les pays du monde, les africains sommes soumis à la contrainte des prêteurs. Un Etat fonctionne à peu près comme une entreprise, ou une famille : Elle a des rentrées et sorties d’argent. Il faut donc que les recettes soient au moins égales aux dépenses pour qu’il y ait équilibre. D’une part, il y a les revenus de l’Etat(les impôts, les taxes colletées…) ; et d’autre part, il ya les dépenses (investissements, salaires versés aux fonctionnaires…). Malheureusement, dans la plupart des cas aujourd’hui, les besoins des Etats dépassent largement leurs recettes : c’est cet écart qu’on appelle les déficits publics. Dans cette situation, il n’y a que deux choix possibles : réduire ses dépenses (privatiser les entreprises publiques, baisse des salaires, gel du recrutement des fonctionnaires…) ou augmenter ses recettes (augmenter les impôts, créer de nouvelles taxes…).

Pour faire fonctionner l’Etat, du fait qu’il dépense plus qu’il ne gagne, les gouvernements ont besoin d’emprunter (surpris ? L’argent public ne tombe pas du ciel). Il doit donc séduire les prêteurs car ces derniers ne sont pas obligés de nous prêter (c’est la différence entre le prêt et l’impôt. l’impôt est obligatoire, pas le prêt). Et qui sont les premiers prêteurs au monde : les banques bien sur ! Et c’est là que le FMI entre en jeu.

Le FMI, et la Banque Mondiale comme leur nom l’indique sont des BANQUES. Sauf qu’elles prêtent aux Etats. Leur mission n’est pas de développer des pays, mais de vendre de l’argent à qui veut l’acheter : c’est-à-dire prêter de l’argent qui leur sera remboursé, plus les intérêts. Il y a une autre chose que je dois vous révéler : Tous les Pays (riches) occidentaux aussi sont très endettés. Ça, beaucoup de personnes l’ignorent. Du moins, en Afrique. Il existe des marchés organisés (les Bourses) où les Etats empruntent constamment de l’argent pour boucler leurs budgets. Des millions d’investisseurs et banquiers privés prêtent donc de l’argent aux Etats riches via ces marchés. Et pourquoi ne prêtent t’ils pas aux pays africains me diriez vous ? La réponse est simple : parce que nous ne sommes pas solvables. L’instabilité de nos gouvernements et la fragilité de nos économies font de nous des prêteurs à risque. Le FMI et la Banque mondiale eux, sont en quelque sorte les Banques des pays pauvres ; ceux en qui les marchés boursiers ne font pas suffisamment confiance. Eux, sont obligés de se tourner vers le FMI, la roue de secours qui leur accorde des crédits accompagnés de conditions (privatisations, réduction du nombre de fonctionnaires…). Ce qui est légitime, puisqu’ils veulent s’assurer d’être remboursés dans le futur.

Alors, la question demeure : « pouvons nous dire allez vous faire foutre au FMI » ? Maintenant, on peut toujours dire « merde » au FMI. Simplement, qu’il n’y aura plus d’argent à la fin du mois pour payer les fonctionnaires. Est-ce vraiment ce que veulent ceux qui scandent « à mort les bailleurs de fonds »?

Si nous sommes soumis aux bailleurs de fonds, c’est entièrement de notre faute. Ou celles de nos dirigeants… Il y a un moyen de simplissime de se délivrer de cette soumission : devenir des Etats crédibles, afin de pouvoir emprunter sur les marchés Bousiers. C’est l’argument développé par Dambisa Moyo, célèbre économiste zambienne de Goldman Sachs, dans son remarquable livre « Dead aid »! Des pays comme l’Afrique du Sud, le Botswana, et Ghana y sont arrivés.

Bien sûr, nous choisirons une autre voie que celle de l’effort justement consenti : la spoliation des tribus villageoises et des petits entrepreneurs, par le pillage des ressources naturelles et par l’augmentation des impôts sur le travail, permettra de ne pas demander trop d’efforts à ces nouveaux privilégiés que sont les chefs d’Etats-rois éternels et les fonctionnaires-sujets (et assimilés).

Dieu rit des hommes qui se plaignent de maux dont ils chérissent les causes.

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