Mes années d’enfance et d’adolescence en Afrique restent à ce jour l’un mes meilleurs moments de ma vie. Notamment parce qu’avec le recul aujourd’hui je réalise la chance que j’ai eu d’avoir des parents qui m’ont très tôt ouvert les yeux sur l’importance du Savoir, et sur les richesses culturelles de l’Afrique. Comme je l’avais déjà raconté, le gout pour la lecture fut le plus cadeau que me léguèrent mes parents. très tôt, ma maman institutrice m’apprit à lire, tandis que mon papa développa mon intérêt naissant pour la littérature, notamment africaine. Ainsi donc, entre 12 et 21ans, j’ai eu l’opportunité de lire d’innombrable oeuvres d’auteurs africains, et dont j’en garde pour certain, un agréable souvenir. Je me suis d’ailleurs promis de tous les relire. Car en relisant leurs résumés aujourd’hui, je me rends compte avec le recul et la maturité que leur sens ne sera plus tout à fait le même.
Voilà donc une liste (non exhaustive) d’oeuvres littéraires africaines qui ont bercé mon enfance et façonné mon identité africaine ainsi que mon rapport à l’Occident. Il s’agit pour certaines d’oeuvres littéraires étudiées au programme scolaire du lycée en Afrique.
NIGERIA
Chinua Achebe – Le monde s’effondre
Le Monde s’effondre est un roman de l’écrivain nigérian Chinua Achebe, paru en 1958. À travers le destin d’Okonkwo, un notable de son clan, Chinua Achebe évoque le choc culturel qu’a représentée pour les autochtones Ibos, à la fin du XIXe siècle, la colonisation du Nigéria par les Britanniques. Presque coupés de l’extérieur, les habitants du clan Ibo (quelque part au Nigéra) en pleine foret équatoriale pouvaient imaginer un monde à leur image, fait de multiples dieux, de culte des ancêtres, de rites et de tabous. L’irruption inopinée des Européens et de leur religion, le christianisme, va alors bouleverser toutes les croyances traditionnelles, faire éclater l’unité du clan, d’où le titre du roman. Une tentative de dialogue est amorcée mais, malheureusement, elle ne sera pas pérenne. Le reste est une histoire d’orgueil, de peur, de haine et d’ignorance.
Wole Soyinka – Aké, les années d’enfance
Aké – nom des lieux où il a vécu son enfance – c’est le regard que porte le grand écrivain nigérian, prix Nobel de littérature en 1986, sur l’Afrique de ses onze premières années. Une terre où le dieu des missionnaires fait face aux masques des danses rituelles, et où surgissent des figures inoubliables : Bukola l’enfant aux compagnons invisibles, Pa-Adatan le matamore hérissé de gris-gris, et surtout » Chrétienne Sauvage « , la mère de Soyinka, véritable déité en qui le Saint Esprit se conjugue aux forces de la vie. Le chef-d’œuvre absolu de l’autobiographie.
SENEGAL
Mariama BÂ – Une Si Longue Lettre
L’auteur sénégalaise fait parler à travers son roman une femme du Sénégal, Ramatoulaye Fall qui écrit à une amie de jeunesse, Aïssatou Ba. A travers le quotidien qu’elle lui conte, c’est toute l’existence des femmes africaines qui se trouve dévoilée. Le roman est composé de 28 lettres et parle de la vie des deux femmes au Sénégal. La narratrice, Ramatoulaye, écrit 28 lettres à sa meilleure amie Aïssatou Bâ. Ramatoulaye raconte son histoire et celle de son mari Modou Fall qui meurt dans un accident. Pendant l’enterrement, on apprends que Modou Fall est aussi le mari de Binetou. Au centre de ce roman épistolaire se trouve en effet la question essentielle de la polygamie. On comprend la véritable détresse ressentie par la femme qui a perdu son mari. Après de longues années de vie commune, il la quitte pour prendre en mariage une femme de l’âge de sa fille. Cette douleur est sans nul doute le cœur du livre. Ce livre traite ose raconter les problème de la femme en Afrique, par exemple la place des femmes en politique, le poids de la tradition, le système des castes, la polygamie et la domination masculine dans la société.
Birago Diop – Les Contes d’Amadou Koumba
Comme tous les écoliers d’Afrique, Birago Diop avait appris et récité des fables de La Fontaine, et comme tous les enfants du Sénégal, il avait entendu les « dits » des veillées autour du feu racontées par les vieillards. Et dans un souci de préservation de cette culture africaine essentiellement orale, Birago Diop publiera donc plus tard une série de contes recueillis auprès des vieux griots. Ce sont des fables relativement brèves et mettant souvent en scène des animaux. Comme c’est souvent le cas dans les contes, ces animaux personnifient un ou plusieurs traits de caractère mis en avant afin de dégager une morale collective. Le livre est rempli de citation et de proverbes plein de sagesses : S’il n’est que de vous nourrir, une seule femme suffit. Tout ce que dit le petit Maure, il l’a appris sous la tente. Rendre un salut n’a jamais écorché la bouche. Si tu plais au Bon Dieu, les hommes ne t’apprécient pas outre mesure. L’eau ne cuira jamais le poisson qu’elle a vu naître et qu’elle a élevé. La promesse est une couverture bien épaisse mais qui s’en couvre grelottera aux grands froids.
Ousmane Sembène – Le Mandat
C’est un des chefs-d’oeuvre de d’Ousmane Sembene. Il traduit bien le fonctionnement de société familiale africaine et les conséquences de la bureaucratie importée par les blancs. Un homme, Ibrahima Dieng, respectable père de famille, reçoit dans son village un mandat de son frère parti travailler à l’étranger. Mais pour toucher ce mandat, il lui faut un carte d’identité. Pour avoir une carte d’identité, il faut avoir un extrait de naissance, pour avoir un extrait de naissance… Bref les contraintes administratives sèment la zizanie dans la vie de cet homme tranquille et de sa large famille si prompte à vouloir dépenser au plus vite le mandat. Mais c’était sans compter sur les arnaques et l’avidité des griots, arnaqueurs et lointain parents qui ont flairé l’odeur de la manne tombée du ciel, l’argent est vite dépensé avant même d’avoir été touché. Vente de bijoux, disputes conjugales et crédit inconsidéré vont précipiter les ennuis du malchanceux citoyen…
CAMEROUN
Mongo Béti – Ville Cruelle
L’œuvre Ville cruelle raconte l’histoire d’un jeune homme appelé Banda. Orphelin de père, Banda fût élevé par sa mère à Bamila un village paumé de la campagne camerounaise. Il voulait se marier pour satisfaire le vœu de sa mère presque mourante. Mais il lui fallait de l’argent pour la dot de sa fiancée. C’est ainsi qu’il décida d’aller vendre sa récolte de cacao en ville. Mais là, l’homme sera confronté aux terribles réalités de la ville marquées par la cruauté, l’exploitation, le vol, le crime, etc. L’œuvre « Ville Cruelle » est centrée la description des pratiques des Blancs en Afrique du point de vue africain. Les pratiques coloniales et la logique économique françaises sont fortement décrites à travers la scission en deux de la ville : Tanga Nord ou Tanga indigènes et Tanga Sud, ville coloniale marquée par la présence de l’administration, des forces de l’ordre, les centres commerciaux des grecs, boutiques et comptoirs d’achats de cacao, des usines. D’autre thématiques sociales telles que la famille, la violence, l’injustice, la solidarité sont abordées également dans le livre.
Guillaume Oyono-Mbia – Trois Prétendants… un mari
Trois prétendants …un mari est une pièce de théâtre qui présente les efforts d’une famille villageoise pour marier Juliette, jeune collégienne, à la manière traditionnelle africaine, c’est-à-dire » au plus offrant « . Juliette en rentrant un jour du lycée, apprends qu’elle a un prétendant, Ndi, jeune paysan qui a déjà versé cent mille francs de dot à ses futurs beaux parents. Ces derniers comptant sur les possibilités immenses que pourrait offrir le deuxième prétendant, Mbia, qui est fonctionnaire, décident de le substituer à Ndi. Celui-là affiche son importance, à l’admiration générale, par la parade fastueuse de sa prétendue richesse. C’est-là l’essentiel pour la vieille génération. Indignée, Juliette refuse constamment d’épouser l’un et l’autre parce qu’elle est amoureuse d’un jeune lycéen de son age, Oko.
L’oeuvre nous met en présence de trois générations différentes chez qui on découvre des attitudes et des points de vue parfois radicalement opposés. La génération des grands-parents qui prône le respect absolu et sans équivoque des traditions ; la génération des parents qui trahit pour sa part, des ambivalences et des réserves sur ces mêmes traditions, et enfin la génération des enfants, celle que représente la jeune collégienne Juliette, qui elle est nettement en révolte contre les contraintes des traditions et les empiétements de celles-ci sur la vie des jeunes de l’Afrique moderne. Ce qu’on voit n’est pas seulement un simple « conflit de générations » mais surtout un conflit de cultures : traditionnelle africaine d’une part, transmise et conservée comme sacro-sainte par ses adhérents ; occidentale, d’autre part, qui sans cesse, remet tout en question.
Ferdinand Oyono – Le vieux nègre et la médaille
Le vieux nègre et la médaille, publié en 1956, se concentre sur la date symbolique du 14 juillet, fêtée dans un district éloigné du Cameroun, alors colonie française. Ce jour-là, Meka, un paysan qui a donné ses terres aux missionnaires pour leur église et dont les deux fils sont morts à la guerre sous le drapeau français, est d’abord heureux d’être honoré par une médaille de reconnaissance de la France, à laquelle tous ses proches applaudissent. En deux jours, après une cérémonie qui tourne au grand guignol et une nuit d’humiliation, le vieil homme prend conscience que ce 14 juillet n’est en fait qu’une mise en scène hypocrite des pouvoirs coloniaux qui parlent d’amitié en maintenant une stricte exclusion des colonisés. La solidarité africaine qui l’entoure à la fin du roman constitue un contrepoint politique et, avec la fierté retrouvée du peuple colonisé, une réponse à la colonisation des Blancs.
Ferdinand Oyono – Une vie de Boy
Une vie de boy, publié en 1956, est centré sur le personnage de Toundi, un boy (garçon domestique de maison) instruit placé chez le commandant blanc d’un district de la colonie française. Le roman dénonce les pratiques autoritaires de la colonisation et au-delà, la négation de l’humanité des colonisés à qui on ne pardonne pas de quitter leur place en découvrant l’envers du décor des maîtres blancs. La place faite à la frustration sexuelle de Toundi vis-à-vis de sa patronne blanche et les turpitudes intimes de celle-ci offrent par ailleurs une approche renouvelée du problème colonial.
AFRIQUE DU SUD
Thomas Mokopu Mofolo – Chaka. Une épopée bantoue
Chaka est le livre le plus célèbre de l’écrivain de langue souto, Thomas Mofolo. C’est une épopée inspirée de la vie réelle de Chaka (1786-1828) qui fonda un véritable empire en Afrique australe avant d’être assassiné par ses frères. Cet ouvrage est un des premiers, rédigé par un auteur africain, qui prenne pour modèle stylistique la tradition orale. Reprenant à son compte le travail des missionnaires protestants qui avaient transcrit les langues locales pour mieux diffuser la Bible, Thomas Mokopu Mofolo entreprend d’écrire l’histoire d’un héros zoulou, Chaka. Ce livre tragique et violent est aussi un livre d’images, un conte fabuleux, et un document sur la vie du peuple zoulou à la veille de l’arrivée des Oum’loungou, les Hommes Blancs. C’est bien là la force des grands poèmes épiques. Ils sont à la fois les livres d’un peuple, pleins de la vérité terrestre, et les messages secrets de l’au-delà. Chaka, symbole de la grandeur et de la chute de l’empire zoulou, par son aventure exemplaire, révèle un autre monde où les vérités essentielles sont encore vivantes.
Andre Brink – Une saison blanche et sèche
Le 1er roman qui m’a été donné de lire sur la ségrégation et l’Apartheid. André Brink raconte l’histoire de Ben Du Toit, un Afrikaner (blanc) de Johannesburg comme les autres, dont la vie bien réglée tourne autour de trois pôles : famille, église, travail. Il prend peu à peu conscience des difficiles conditions de vie des Noirs dans son pays lorsque Gordon, le balayeur noir de l’école où il enseigne, pour lequel il s’était pris d’amitié, est arrêté. Gordon avait entrepris une enquête pour éclaircir les conditions de la mort de son fils en prison, un jeune garçon doué, dont Ben avait entrepris de payer les études plus tard. L’adolescent s’était retrouvé dans une manifestation qui avait dégénéré, car, comme tant d’autres jeunes noirs d’Afrique du Sud il ne pouvait plus supporter les lois raciales dans lesquelles avaient vécu leurs pères. Dans la moiteur des nuits orageuses de Pretoria, Ben Du Toit découvre un monde tout proche et pourtant si loin de sa vie d’Afrikaner. Peu à peu, il ouvre des yeux incrédules sur un système qu’il cautionne par ignorance et par lâcheté et qui entretient une communauté, un peuple, dans le désespoir et la résignation. La naïveté de Ben est telle qu’il croit encore à une justice où toute notion de couleur ou de race serait abolie, mais dans les années quatre-vingt en Afrique du Sud, l’espoir est un privilège de Blanc. Loin d’avoir voulu faire de son personnage un héros acquis à une cause humanitaire, André Brink dépeint un homme révolté qui se battra pour comprendre pourquoi les services de police peuvent en toute impunité tuer des hommes parce qu’ils sont noirs. Dans le pays de l’apartheid, les moyens pour préserver la sécurité d’État sont expéditifs, Ben l’apprendra à ses dépens…et le payera de sa vie.
Bonjour,
Je pense que tu pourrais faire une petite place à Amadou Hampathé Bâ avec ses oeuvre Amkoulel ,l’enfant Peuhl ou encore l’étrange destin de Wangrin.
Il est vrai que la littérature est riche et surtout qu’on nous rapelle des valeurs qui bien souvent sont oubliées au détriment de celles inculquées par la colonisation.
@Fatou,
Merci de m’avoir rappelé Amadou Hampathé Bâ, figure importante de la littérature malienne. Je n’ai lu que l’étrange destin de Wangrin il y a fort longtemps et je ne me rapelle vraiment plus du sujet. ça fait partie des ouvrages dans lequel je devrais me replonger. Il faudrait que je regarde l’enfant peuhl aussi.
Et en parlant d’enfant, je viens de me souvenir que j’ai également omis de citer « L’enfant Noir » du guinéen Camara Laye.
Comme je l’ai dit en introduction la liste n’a aucune prétention autre que celle de citer des ouvrages dont je me rappelle.
Bonjour à vous deux,
A cette magnifique liste (j’ai eu l’occasion, au cours de mes études secondaires, d’étudier certaines de ces œuvres), je rajoute « Marie LEZOU ou les écueils de la vie » de l’ivoirienne Régina YAOU NDOUFOU. Une livre qui m’a bouleversée alors que j’étais en classe de 3ème!
Sinon merci Neo pour le sujet: ça réchauffe le cœur de savoir que les enfants d’Afrique savent encore chercher la Vérité chez leurs Anciens ^^.
Signée une passionnée de littérature.
Je suis particulièrement ému de la façon dont vous faites part de vos sentiments à l’égard de la littérature africaine,franchement j’ai le coeur gai…
vous avez une une façon de relater les faits qui me donne une chair de poule.
Moi aussi je suis un passionné de la littérature et j’aimerais écrire des livres qui bondiront le cœur des Hommes.J’ai besoin de vos conseils…
se que je met a mon profit es que cette site permet beaucoup des personnes a se cultiver, nous facilite le tache que d’aller au bibliotheque on reste a la maison et on se navigue pour trouve tous se qu’ on veu sur les oeuvres litteraires et d’autres vraiment c’est une maniere exceptionnelle
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ces oeuvrages sont nos diferentes identites
bonjour puis-je avoir une liste d’auteur africains et leurs oeuvres qui parlent de la polygamie ou de la condition de la femme dans un foyer polygame
Soyez salués mes frères et soeurs. Je suis ravi que vous ayez un intérêt dominant à l’égard de nos valeurs, sources de nos identités. Vive l’Afrique !