« Le poète romain Phaedre a écrit: Les choses ne sont pas toujours ce qu’elles sembles êtres, donc on se laisse tromper par les apparences. Rares sont ceux qui ont l’intelligence de voir ce qui se cache derrière le masque. »
J’ai toujours eu le plus grand des mépris pour les pseudos fils de bourgeois de la diaspora africaine.
Les fils Biya, Bongo, Kabila, Dangote, Sawiris … très peu de “fils de” trouvent grâce à mes yeux. Qu’ont-ils fait pour mériter mon respect? Quelle est la part des richesses qu’ils possèdent dont ils peuvent s’attribuer la paternité? Aucune. Quelles décisions ont-ils prises… quels risques ont ils encourus pour être ou ils sont? Même le banquier suisse qui supervise la reproduction de leurs élevages de billets verts a été coopté par un autre.
Que leur papa en Afrique soit Chef d’Etat, Ministre, homme d’affaire, ou autre haut fonctionnaire, les “fils de” (p****) jouissent d’un pouvoir indu.
Quand tu discutes avec leurs têtes de turc trop parfaite. Ah oui… je ne t’ai pas dit? Le fils a papa est, en général, très élégant et beau gosse… bah oui… l’argent aidant, leur papa (très laid) s’est marié avec une femme très belle (genre Miss Afrique 82)… comme si tu avais besoin qu’on ajoute du sel sur tes plaies, pas vrai? Le fils a papa habite un bel appartement dans un quartier huppé, fréquente les clubs branchées et selects, parle avec un accent irréprochable, ne prends jamais le métro, ne sais pas ce que signifie « sans-papier »… Je t’imagine déjà mordre ta lèvre inférieure jusqu’au sang pour ne pas leur cracher au visage.
“Qu’avez vous cher ami… vous tremblez? Avez-vous attrapé froid?”
Non. C’est juste mon corps tout entier qui lutte contre lui-même pour empêcher ma droite d’enchaîner ta mâchoire.
Cela m’amène à me poser de vraies questions philosophiques… que vais-je faire de mon fils demain? Je suis l’homme que je suis parce que j’ai vécu dans un bled paumé, parce que j’ai du m’imposer dans une meute de louveteaux exclusivement composée de mâles dominants. J’ai toujours eu faim de babioles de luxe et du pouvoir qu’elles projettent à la face de ceux qui ne peuvent se les permettre, que parce que j’en ai fait mon Carême durant toute ma jeunesse. Je n’ai pu ni boire, ni manger aucune de ces choses qui me faisaient envie. J’ai forgé mon intelligence et mon ambition au feu d’une privation douloureuse.
Mais j’ai également vécu la rupture de mon jeûne comme une récompense… la date sucrée qui accompagne la fraîcheur du coucher de soleil…
Pour rien au monde je n’échangerais mon enfance contre des vacances au ski dans un chalet à Courchevel toutes les années.
Les « fils de… » sont souvent des incapables: ils ne savent pas d’où vient leur argent. Ils s’en moquent. Pour eux, la banque est une boite magique toujours un peu plus pleine après chacune de leur visite. Ils claquent facilement 5000Euros en soiree farotage pour susciter des petits cris de plaisirs chez des pétasses bon marche et peroxydées.
Les self-made men sont des intelligences vives, précises, affûtées. Ils comprennent qu’un franc gagnée aujourd’hui vaut plus que le même franc gagner un an plus tard.
C’est pourquoi j’ai pensé que mon fils irait faire une partie de sa scolarité au bled… même si Papa peut lui payer Harvard. Je veux qu’il côtoie la misère. Je voudrais qu’il se batte en cours de recréation. Je voudrais qu’il revienne avec des cicatrices à la maison. Je voudrais que mon fils soit en galère de monnaie. Je ne lui donnerai, d’ailleurs, aucun argent de poche (ou alors, très peu)… il n’aurait qu’à tondre la pelouse du voisin pour se payer sa paire de Nike… ou voler les faveurs d’une copine éperdument amoureuse de ses grands yeux (qu’il tiendra de son Papa… ben ouais… obligé!). Plus j’y réfléchissait, plus j’aimais cette idée. Survivre à l’université en Afrique et en sortir avec une Licence mention “Bien”, c’est être un peu l’équivalent antique de l’agôgè… nom donné à l’étudiant robuste et discipliné du système d’éducation Spartiate. Savais-tu qu’on affamait les agôgès… qu’on les poussait au vol… et qu’ils étaient sévèrement punis s’ils étaient pris la main dans le sac? On aiguisait ainsi leur ruse…
J’ai pensé a tout ça et puis, je me suis dit à quoi bon? Et puis non! mon fils n’ira pas étudier en Afrique; il ne vivra pas tout ce que j’ai vécu… Il sera un “fils de”…mais d’un autre genre.
A suivre…
J'aime beaucoup comment tu écris…Et en plus c'est bien vrai!
Mes fils, seront beaux à grande gueule, (exactement comme leur mère oui, mes chevilles vont bien, je te remercie), mais surtout je les veux courageux et intègres, comme leur père! Je leur donnerais de l'argent de poche et je les battrais quand il faut. Je les aimerais de tout mon coeur et leur interdirais ce qu'ils veulent de tout leur coeur…si je le juge nécessaire. Je voudrais qu'ils n'aient jamais honte de leurs origines, ni de ce qui fait leur essence. L'éducation africaine a le mérite de forger le caractère…c'est bien ce que je voudrais, qu'ils aient du caractère!
Lol Lena!
A un moment j’ai eu honte de moi. Je suis une » fille de » de la bourgeoisie africaine discrète . Et puis j’ai compris quelque chose. En fait, tu es comme mon père et comme ma mère 🙂 ces gosses des quartiers pauvres qui ont grandi heureux, pas dans la misère mais certainement pas dans le luxe non plus. Qui ont passé leurs années lycées au pays, leurs années d’étudiant à la fac et sont revenus pour offrir à leurs enfants les objets qu’ils n’ont jamais eus afin de vivre une deuxième jeunesse, celle dont ils avaient rêvé . Ils se promettent en silence de ne pas faire de leurs enfants une jeunesse tapageuse et indécente alors leur morale est stricte et bienveillante .Tu fais partie de la bourgeoisie africaine discrète, celle des secondes génération .
Tes enfants seront bilingues, trilingues si tu leur paies le câble américain . Ils sauront tous de leur ethnie et de la dernière pop star à la mode . Ils verront la pauvreté sans ciller . Ils feront leurs études à l’étranger . Mais si tu ne veilles pas à leur éducation, ils seront des » fils de » sans intérêt, ignorants des trésors de la double culture africaine/ethnique et européenne/occidentale.
Sois heureux, tu n’es pas parti gagnant tu finiras glorieux comme mon père. Il est à ce jour le seul homme qui trouve grâce à mes yeux. Il est cultivé, il est trilingue (et sans accent!) , il est élégant, il est coléreux, il est polémique mais surtout il a eu une enfance difficile et ça a fait de lui un homme riche de vie et de courage . Je finirai par ceci : mon père m’a appris le plaisir intellectuel et rien que pour ça, rien que pour ça mon père est un homme glorieux .
je trouve cet article fort interessant mais ce que je reproche « j’aimait » pas un « t » mais un « s »
OUps! faute corrigée. merci pour la remarque. 😉