Mais où sont donc passés les intellectuels et savants africains…?

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Depuis la fin du moyen-age, la connaissance scientifique n’a cessée de prouver ses vertus de vérification et de découverte par rapport a tous autres modes de connaissance. C’est la connaissance « falsifiable » (dans le sens de Popper qui veut dire vérifiable et susceptible de rejet) qui mène la grande aventure de la découverte de l’univers, de la vie, de l’homme. Le système rigoureux de pensée qui s’organise autour de la science a apporté un fabuleux progrès un peu partout où il est arrivé. Désormais, le monde devenait capable de mesurer, peser, analyser le soleil, évaluer le nombre de particules l’univers, déchiffrer le code génétique et organiser la production des biens et services capables de hausser le bien-être moyen. Au niveau de la prévision, se basant sur des simples régressions linéaires de Newton et des modèles plus complexe de relativité d’Einstein, la science permet une précision extrême dans tous les domaines de l’action, de l’économie jusque dans le guidage des vaisseaux spatiaux hors de l’orbite terrestre. La science a permis a l’humanité de se libérer du charlatanisme et de l’obscurantisme en mettant entre les mains de l’homme un outil rigoureux de perception de la réalité et de prévision. La science a permis ainsi de résoudre des énigmes, de dissiper des mystères et de rejeter des illusions et fantasmes.

Et pourtant, malgré ses bienfaits, il se trouve toujours des esprits qui rejettent la rigueur scientifique parce qu’ils (ces esprits) ne peuvent fournir l’effort nécessaire qu’exige ce « chemin de croix ».
Dans les années 1960, alors que l’optimisme béat était a son zénith dans les milieux des élites africaines, René Dumont prédisait déjà que l’Afrique noire était mal partie. Peine perdue, les élites africaines étaient tellement occupées à sauter aux pas de danse du fameux hymne au bonheur nègre ‘indépendance oyééé’ que personne n’osa visiter les hypothèses qu’avançait Dumont. Aux africains, il était dit que l’effort n’avait pas d’importance puisque l’aide internationale fera l’affaire. Malgré le fait que la production ne cessait de chuter partout, sauf dans quelques pays, les Africains étaient menés en bateau avec des conférences sur le développement du continent, des initiatives, slogans et promesses fallacieuses. Des nombreux mécanismes de solidarité économique et financière ont été mis en place entre l’Europe et l’Afrique. Aujourd’hui, le constat d’échec est patent. René Dumont avait raison; il continue d’avoir raison, et son mode de pensée aussi : L’Afrique est mal partie. Malgré cela, les élites africaines, et surtout celles d’Afrique noire Francophone , demeurent fidèles aux illusions multiples qu’ils perpétuent au fil des générations et qu’ils tentent tant bien que mal d’inculquer au jeunes.

A commencer par celle des diplômes, perçus comme une fin en soi et gage d’une certaine légitimité.

Il n’y a qu’à regarder les étudiants dans les universités africaines, aussi friands de titres universitaires que des abeilles du pollen des fleurs. Ils avancent dans leurs études comme un cycliste les yeux rivés sur le guidon, sans jamais regarder en avant ni en arrière. Combien de fois ai-je rencontré des gens qui étaient ultra motivés, prêt à passer d’interminables années sur les bacs de la fac, mais tout en étant incapables de te dire exactement ce qu’ils feraient après avoir accumulé tous les diplômes de la terre (hormis se balader en exhibant avec fierté son titre de Docteur ou Professeur Agrégé en machin truc chose…)? On ne peut pas leur en vouloir pour ça. Il faut dire qu’ils ne font que suivre le chemin de leurs ainées. L’intellectuel africain croit qu’une fois qu’il a obtenu son diplôme, tout est accompli. Il ne déploie même pas l’effort de conserver son ses connaissances. Dans la plupart des pays africains, on (les autres et vous même) vous évalue sur base de votre diplôme (ou pire : sur la base de l’étendue de votre réseau de relationnel) et jamais sur base de ce que vous avez ou pouvez réellement accomplir. Pour ne prendre que les cas de nos docteurs… il suffit de parcourir des revues scientifiques spécialisés dans différents domaines pour comprendre ce que je dis.

Le classement annuel de Shangaï qui évalue la performance des universités et centres de recherche à travers le monde, reprend le nombre des publications scientifiques des quelques pays africains. cet indicateur sert d’indicateur par défaut ( qui est censé refléter la variable dont la mesure n’est pas disponible) du niveau/culture scientifique de nos pays. Le Bangladesh par exemple, qui a un niveau de revenu par habitant pas très loin de celui du Cameroun, affiche pourtant un niveau universitaire de loin supérieur. Nous ne faisons mieux que face au Mozambique, Rwanda, Swaziland…sans nous comparer à l’Afrique du Sud ou à l’Égypte.

La situation est encore pire lorsque vous cherchez les noms des scientifiques congolais, gabonnais ou camerounais dans les répertoires de leurs domaines respectifs (disponibles sur les ScienceDirect, JSTOR ou Oxfordjournals pour ceux qui ont les abonnements). Que ceux qui ont accès a ces bases des données essaient seulement de chercher les références de nos soit-disant Génies. On se demande par quelle magie les africains continuent a se mentir, a mentir a notre jeunesse avec des slogans sans fondement.

La capacité scientifique ne tient pas au diplôme universitaire, une thèse de doctorat ou maitrise mais plutôt à la production qui résulte de cette certification qui n’est pas la fin mais plutôt le début d’une carrière au service de la progression des connaissances. Le diplôme ou la thèse? On peut la faire écrire par un cousin si seulement on l’achète pas simplement (en Afrique, cela n’offusque personne). En clair, nos jeunes (et surtout les parents qui dépensent des fortunes dans des écoles à la noix) doivent comprendre une fois pour toute que les diplômes universitaires ne servent strictement à RIEN! Si vous penser que c’est quand votre enfant sera Docteur ou diplomé d’une université occidentale qu’il vaudra plus, vous vous fourrez le doigt dans l’œil jusqu’au coude. D’ailleurs, à propos des visas pour étudier à l’étranger, j’en parlait déjà dans un précédent billet sur ce blog. La valeur ou l’utilité d’un Homme n’est en aucun cas corrélé à son bagage universitaire.

Est ce à dire finalement que nous africains n’apportons aucune contribution au progrès du Savoir à l’échelle mondiale? Bien sur que non! Nombre d’africains participent activement à l’amélioration de la condition humaine. Bien plus que ceux que nous appelons « nos élites » et qui prétendent nous éclairer. Mais où sont passés nos vrais intellectuels ? Ceux capables de nous sortir de la merde dans laquelle nous sommes depuis un demi-siècle déjà?

(A suivre…)

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