C’est quoi être un français issu de l’immigration?

J’avais choisi délibérément de me tenir à l’écart de tous les débats qui ont lieu en France actuellement sur l' »Identité Nationale » mais les circonstances me poussent à en parler finalement.
En effet, je discutais récemment avec une vieille connaissance originaire comme moi d’Afrique, quand la conversation a dévié sur la nationalité française. Il m’a fait part de son intention de demander à être naturalisé français d’ici l’an prochain. A ma question « pourquoi veux tu devenir français »; sa réponse m’a aussi bien amusé que laissé perplexe.

« Pour simplement être tranquille, pouvoir vivre et circuler comme je veux et où je veux » me rétorqua t-il.

Cette réponse illustre à elle seule l’état d’esprit de l’immense majorité des français et françaises issus de l’immigration. Les valeurs et principes de la république, les symboles, etc…intéressent très peu ces derniers. Ils n’en ont rien à cirer. Alors, Ces ministres me font bien rire avec l’organisation de leur grand débat sur l’identité nationale

En effet, Les français qui ont leurs racines sur le continent européen (j’entends par là qui sont en Europe depuis au moins trois génération) n’ont pas de problème avec leur identité. Ils savent très bien qui ils sont, et ce que c’est que d’être français. D’ailleurs pour eux, ce débat se révèle même être contradictoire car il n’y a pas si longtemps que ça, on leur a promu l’idée et le sentiment d’appartenance à une communauté Européenne, aussi bien culturelle que économique.
Ceux qui ont un réel problème identitaire, ce sont les nouveaux français, descendants d’immigrés ou naturalisés. notamment ceux issus d’une entité culturelle non Ouest-européenne (ou latine). Je constate que les nouveaux immigrants en Europe sont tiraillés entre deux luttes : celle d’une reconnaissance et de leur acceptation en tant qu’Européens « comme les autres » d’une part (Rama yade, Gaston kelman…), et celle de la défense et de la revendication de leur culture/identité originelle (Kemi Seba…). Tandis que les uns assument fièrement et revendiquent même leur statut de « gaulois », les autres sont tiraillés entre deux sentiments contradictoires: d’une part ils méprisent (et rejettent) la France qui symbolise à leurs yeux encore le néo-colonialisme malsain des peuples Africains, d’autre part ils sont bien contents de profiter du système et de tous les avantages liés au statut de « français ».Ça peut être choquant ce que je raconte, mais c’est la vérité: une grande partie des problèmes actuels de la France est lié à l’immigration. Attention, ce n’est pas la faute des immigrés, mais c’est lié à l’immigration.

Je m’explique:
Quand la France fait venir des travailleurs immigrés des pays pauvres, elle est vachement gagnante. Les immigrés font les boulots les plus durs dont les français ne veulent pas, en même temps, ils font pas de vagues. Car ils sont contents d’avoir des conditions de vie meilleures que dans leurs pays d’origine. Sinon ils seraient pas là, ou ils seraient pas restés.
Le problèmes commence avec leurs enfants: ils naissent ici, ils grandissent ici. Donc leur base de comparaison est la même que tous les « français de base ». Ils veulent les mêmes traitements, les mêmes droits au sens large. Ils ont les mêmes définitions d’une vie « confortable » et une vie « pénible » que les autres français. Ils veulent avoir des boulots « peinards » et bien rémunérés comme les français, toucher les mêmes allocations et aides sociales. Ils veulent habiter dans les mêmes « beaux quartiers » que les français. Ils veulent être perçus comme aussi « attirant » ou « cool » ou tout ce que vous voulez que les autres français…
Ils veulent être vus comme aussi capables de faire autre chose que la musique ou le sport etc…
Ils veulent ….

Mais ça, les vieux français réacts qui sont déjà là depuis des lustres ne sont pas prêts à leur donner ça. C’est logique, si on tient compte des mentalités française. Si c’est juste pour avoir plus monde sur le territoire qui demande la même chose dans la vie, autant faire plus d’enfants, pourquoi faire appel à l’immigration? En plus, les gens qui viennent d’ailleurs « ne nous ressemblent même pas »… « ils apportent leurs cultures, leurs mosquées, leur polygamie »… « ils nous envahissent et menacent nos propres cultures »…

Je sais que l’Europe n’est pas un continent de pionniers comme l’Amérique. Ce continent avait déjà des siècles d’histoire derrière elle quand l’Amérique n’était qu’une terre sauvage et inconnue.
Du coup, discrimination, marginalisation, frustration, violence…
Pour eux (les vieux français conservateurs), quand on parle d’insécurité et violence, ils pensent « arabes » et « noirs ». A raison d’ailleurs! C’est peut-être extrême, mais voyons la réalité devant nous: c’est vrai que la plupart des immigrés/enfants d’immigré sont des gens honnêtes, mais parmi les voyous, la plupart sont issus de cette communauté. C’est un peu comme 99% des femmes ne se prostituent pas, mais les prostituées sont à 99% des femmes. Voyez ce que je veux dire.

– Quelles sont les mesures éventuelles à prendre?
Je sais, je suis de plus en plus choquant.
Il est déjà trop tard! la France (comme les autres pays d’Europe) doit assumer son passé colonial. S’ils tenaient tant à leur identité ils n’auraient jamais du coloniser les autres peuples par leur soit disant « mission civilisatrice », tout comme ils n’auraient jamais du laisser les ouvriers immigrés s’installer en familles durablement en France. Car ce qui poserait problèmes ne sont pas les gentils petits immigrés, mais leurs enfants 20 ans plus tard.

De la même manière, immigration choisie ou pas, la politique d’immigration de la France aujourd’hui définira la société française dans 20ans. Reste à définir à quoi la France aimerait ressembler dans 20ans. Je laisse ce travail aux politiques français. En ce qui me concerne, je m’en fout! je ne suis pas français et je n’ai pas l’intention de le devenir.

Conclusion à l’attention des immigrés: si vous pensez à la naturalisation, faites-la vite…car attendant que la France définisse une politique claire, ça risque de devenir compliqué, et de se faire sur des critères de plus en plus arbitraires.

4 Commentaires C’est quoi être un français issu de l’immigration?

  1. Bertein

    Cher ami (tu me permettras cette familiarité depuis que je sens une communauté de vues en bien des points)permets moi de formuler 2 ou 3 observations:

    – D’abord, tu pointes le problème (ou tu plantes le décor pour reprendre ton expression): la réponse que t’a fait ta vielle connaissance est symptomatique (« Pour simplement être tranquille, pouvoir vivre et circuler comme je veux et où je veux » me rétorqua t-il.). Elle est symptomatique de l’attitude à l’égard de la nationalité française qui se réduit tout au plus à un vulgaire bout de papier gris.

    – Dans ces conditions (et il n’y a pas que ta vieille connaissance qui pense ça), le débat sur l’identité nationale se justifie. Sur le fond, ce débat est totalement justifié. Depuis le temps qu’il y a des bouquins qui sortent et des réunions politico-philosophiques sur le sujet. Au passage ce débat existe dans tous les pays d’Europe (souviens toi en Hollande, le cinéaste Van Gogh assassiné, les dessins sur le prophète Mohamed au Danemark, en Italie etc…)

    – A mon avis les raisons du surgissement de « l’identité » sont doubles:

    d’une part c’est la mondialisation: c’est un paradoxe humain mais plus on se mondialise et plus on a besoin de revenir vers ce qui fait notre identité propre (« Le Yin et le Yang », l’ami). Regardes toutes les télé Bretagne, Corse, Pays-Basque. Il y a un retour à la terre de nos ancêtres. Dans ce monde incertain, on a besoin de certitude, la certitude c’est la terre. « Pour savoir où on va il faut savoir d’où on vient » (dixit Sarko).

    Donc la première raison, c’est la mondialisation qui entraîne paradoxalement le surgissement de la question identitaire.

    Deuxième raison, bien entendu: la France n’est plus blanche et catholique; elle est multiculturelle et multicultuelle.

    C’est un fait inéluctable et comme moi, je combats des idées mais jamais les faits. Il faut l’accepter ainsi que cela plaise ou pas, la France est une Eglise, une Mosquée et une Synagogue. Et un cimetière musulman ou juif profané, c’est la France unie qui doit s’élever comme un seul homme derrière des compatriotes injustement persécutés.

    Par conséquent, il y a une vraie question identitaire en France comme dans les autres pays Européens (t’imagines la cohabitation entre les Finlandais et les Sénégalais d’Helsinki?)

    Cette question identitaire, elle n’est pas neutre. OUI il faut en discuter. OUI, l’issue de cette discussion définira les 20 prochaines années.

    – Même si ce débat est totalement justifié, il y a une fine tactique politique en arrière-plan: Sarko veut couper l’herbe sous les pieds du FN. Il s’est déjà employé à empêcher la revente du Paquebot, à St Cloud. Il sait qu’en période de crise, les extrêmes montent. Tant que Besancenot monte pas de problème, ça divise la gauche, c’est tout bénéf pour UMP. Le vrai ennemi c’est donc le FN. Soulever le débat sur l’identité nationale, c’est ramener vers soi l’aile droite la plus dure.

    – En revanche tu aurais pu faire l’économie de ce qui n’est franchement pas une réflexion à ta hauteur:

    « C’est peut-être extrême, mais voyons la réalité devant nous: c’est vrai que la plupart des immigrés/enfants d’immigré sont des gens honnêtes, mais parmi les voyous, la plupart sont issus de cette communauté »

    Qu’est ce que ça apporte cette idée? T’as des statistiques ethniques pour prouver que « parmi les voyous, la plupart sont issus de cette communauté »? Et puis c’est quoi ce virage communautariste?

    On parle de communauté française, pas de communauté ethnique. Attention au danger du communautarisme, il faut absolument lutter contre ça. C’est plus facile de voir ce qui divise que de mettre en avant ce qui réunit et ce qui fonde les valeurs d’une Nation, d’une Culture, d’une Identité. Putain quand je vois certain noirs qui parlent comme des Gérard de bistrots, non mais attends, ils sont pas moins Français que moi ces mecs là.

    Bon mais à part ça, t’as de bons sujets, tu les traites bien, je te tire mon chapeau, t’es un esprit libre, un vrai rebelle en somme. Ca fait du bien.

    De la part d’un Français de confession Juive (non pratiquant mais qui croit quand même) qui a voté Sarko, qui a des amis musulmans, qui sort avec une femme française qui se prend toujours pour une Ivoirienne.

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  2. Neo

    @ Bertein,

    Merçi pour toutes tes observations qui vont exactement dans le sens de mes opinions.
    – Le débat sur l’identité se justifie.
    – Mais comme par hasard, il revient sur le devant de la scène uniquement à l’approche d’élections.

    A propos de la réflexion sur les voyous, je l’assume totalement. Loin de moi l’idée de stigmatiser les immigrés (j’en fais partie). Mais il ne faut pas non plus se voiler la face. Voilà l’une des raisons pour lesquelles je suis également POUR les statistiques ethniques. Comme ça, au moins, les choses seront claires. On saura s’il y a effectivement « trop » d’immigrés en france. Et on saura également ce que la droite entend pas « trop ». A défaut de statistiques sur l’immigration, il y a d’autres données plus révélatrices : le nombre de noirs ou d’arabes dans les prisons, le taux de chômage au sein des populations issues de l’immigration, etc…

    Je vais encore te surprendre : je suis communautariste, et je l’assume totalement. je ne crois pas en cette mascarade appelée l’égalité républicaine (bcp de ceux qui y ont cru se sont heurté au fameux plafond de verre). OUi le communautarisme a ses dangers. mais le plus grand danger à mon avis est de tenter de diluer toutes nos spécificités dans un grand machin qu’on appelle « la culture française » (cf les réflexions de certains ministres UMP actuels).

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  3. Bertein

    1) Bon pour les statistiques ethniques, t’as des arguments intéressants mais je n’y vois toujours pas l’intérêt.

    Il y a tant de noirs et d’arabes dans les prisons, ok and so what?

    Il y a tant de noirs et d’arabes dans tel ou tel quartier, ok, alors qu’est ce qu’on fait s’il y en a trop ou pas assez? On incite des noirs et des arabes à aller dans certains quartiers statistiquement blancs et inversement on incite des blancs à s’installer dans des quartiers noirs et arabes pour davantage de mixité?

    Ca me paraît compliqué d’autant que la catégorisation d’une société métissée semble hasardeuse: dans quelle catégorie je range un métis? et puis pour savoir s’il y a « trop d’immigré », pas besoin de statistiques ethniques, il y a les chiffres sur l’immigration que publie l’INSEE ou le Ministère de « l’Immigration, de la Coopération et de l’Identité Nationale ».

    En revanche, je crois aux discriminations positives ou « actions positives » pour les gens qui s’attachent qu’aux mots et pas aux réalités. Quand t’as un noir, un arabe, un juif contraints de travailler ensemble, de se côtoyer au quotidien, forcément les opinions des uns et des autres évoluent.

    Ce qui fait problème dans l’immigration, ce ne sont pas les immigrés, ça a été la gestion de l’immigration (je crois que tu le dis quelque part d’ailleurs). On a acueilli des gens parce qu’on avait besoin de main d’oeuvre sans préparer l’avenir. Préparer l’avenir, c’était penser que ces gens s’établiraient pour de bons et y éleveraient des enfants. Depuis longtemps il aurait fallu clairement édicter des valeurs, des règles communes et les appliquer.

    Quelles valeurs font l’identité française d’aujourd’hui? Il y a une tension entre le respect de la diversité et le respect de valeurs communes qui fait l’unité d’une société. L’unité dans la diversité.

    Le hijjab oui mais le niquab et la burqua impossible en France. De même l’obligation de parler français, l’obligation de respecter certaines valeurs: respecter les femmes ne pas jeter de l’acide sur les femmes, accepter qu’un médecin homme ausculte une femme, ne pas rejeter l’homosexualité etc….

    (en revanche pour la polygamie, je serais hélas plus circonspect sur les bienfaits de la monogamie)

    2) L’unité dans la diversité.

    La diversité c’est le contraire de l’uniformité. L’unité ce n’est pas l’uniformité. L’unité c’est le contraire de la division. Or, le communautarisme c’est la division.

    D’abord qu’est ce qu’on entend par le communautarisme?

    Un communautarisme politique, on ne se mélange pas, les juifs se marient avec les juifs, les musulmans entre eux, les blancs entre eux, les noirs entre eux. Mon dieu, quand je vois toutes ces belles femmes aux origines aussi bigarrées, ça me ferait mal au coeur de ne pas les approcher.

    Et puis quoi, on fonde un parti politique noir? Pour défendre les droits des noirs de France; un parti chinois? un parti Juif? Pour un programme politique, je trouve ça franchement limité. J’ai vu des tentatives, ça a été un échec complet. Pourquoi? Parce que cela ne donne aucun espoir aux d’un monde meilleur aux électeurs.

    Un communautarisme juridique? Les mariages et divorces des Juifs sont traités par des tribunaux Juifs, des tribunaux musulmans pour les musulmans?

    Le communautarisme n’est pas une vision d’avenir.
    La vérité, c’est qu’avec notre génération, la génération Y, ces tensions vont s’aplanir lorsqu’on prendre réellement le pouvoir parce que la génération Y dans son immense majorité est une génération métissée ou une génération qui a eu l’habitude d’être avec des Juifs, des noirs, des blancs, des asiatiques, des arabes etc.

    L’avenir de la France se lit à la sortie d’une maternelle.
    Lorsque je vais chercher ma fille à l’école (je suis dans le 13 ème à Paris – quartier chinois), je me rends bien compte que l’inéluctable est là: la France est multiculturelle et multicultuelle, que le communautarisme n’a pas d’avenir et qu’on finira bien par définir cette unité dans la diversité.

    Au plaisir d’une prochaine discussion.

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