« Albert Einstein disait; Quiconque prétend s’ériger en juge de la vérité et du savoir s’expose à périr sous les éclats de rire des dieux »
La philosophie à l’époque de la Grèce antique, est née d’une réaction contre le poids abusif de l’opinion. En exigeant de comprendre les faits avant de choisir d’y adhérer ou non, la philosophie a promu des méthodes de réflexions méthodiques. Dans le domaine politique en particulier, la question du rôle de l’opinion publique s’est très tôt posée, précisément dans un espace démocratique qui es de fait, étroitement dépendant de l’opinion publique. Très vite, certains esprits se sont spécialisés dans l’art de manipuler l’opinion des assemblées. Très vite, la démocratie s’est alors trouvée menacée par l’art de séduire les peuples, souvent dans le dessein conscient de « tyraniser en douceur ».
Mais le problème n’a pas disparu au fil des siècles. bien au contraire…La liberté d’expression et d’information est plus que jamais essentielle. Malheureusement, les médias, qualifiés de « quatrième pouvoir », ont lentement dérivé de leur rôle d’informateurs objectifs, devenant lorsqu’elles ne sont pas des vitrines de « divertissement », des outils de « propagande » pour les gens qui confondent « idées reçues » et « vérité objective ».
C’est ainsi qu’on voit apparaitre des personnages tels qu’Eric Zemour, défenseur autoproclamé de la France blanche et chrétienne, menacée d’invasion par ces hordes de nègres et d’arabes…Ces barbares incultes, responsable de tous les maux de la société; entre autres l’islamisation de l’Europe, délinquance et appauvrissement de la population…
Bien-sur qu’il est éditorialiste ce Mr Zemour, et qu’un éditorialiste est payé pour donner son opinion. Mais où s’arrête la liberté d’expression et d’opinion? La liberté de penser est un des droits posés par la Déclaration de Droits de l’homme, au même titre que nous posons un droit de réunion, une liberté civile d’action permettant de faire ce qui ne nuit pas à la liberté d’autrui. La liberté de penser est entendue au sens de la possibilité pour chacun d’avoir ses propres opinions sur tous les sujets, sans devoir être inquiété par une quelconque autorité, parce qu’il pense ceci ou cela et n’est pas d’accord notamment avec les vues du pouvoir politique en place ou de l’opinion publique. Nous voulons pour chacun dans une démocratie la liberté de penser. Je suis formellement opposé au délit d’opinion. Le délit d’opinion est dans un régime totalitaire le contraire de la liberté de pensée, il consiste à pourchasser ceux qui aurait l’injure, ou l’audace de soutenir une opinion qui a été interdite par l’État. En URSS, en Chine ou dans certains pays Africains on a poursuivi les intellectuels pour leurs opinions dites « bourgeoises » ou « réactionnaires » dès qu’elles s’écartaient de la doctrine du parti et de la propagande officielle. En Iran, la presse est soigneusement muselée. La liberté de penser est alors réduite par la censure du pouvoir.
La contradiction est pourtant présente : d’un côté la liberté de pensée laisse à chacun le droit de penser ce qu’il veut, mais il est possible d’abuser de ce droit. Ce droit il est fondamental dans notre démocratie. Nous n’avons pas le droit d’obliger qui que ce soit à penser comme nous. Mieux, à la limite ce droit revient à dire : « je suis opposé complètement à vos opinions, mais je me battrai de toute mes forces pour faire en sorte que vous pouviez les exprimer ». Mais il y a le principe et son application, il y a le principe et ses abus. Il est facile de proclamer en l’air que chacun a droit a sa liberté de pensée tout en continuant à regarder d’un mauvais œil celui qui a des opinions différentes des siennes. On peut en théorie être « pour » la liberté de pensée, mais quel sens cela a-t-il quand le père ne supporte pas que le fils vote de manière différente, qu’il ne suive pas la religion de ses parents ! Quel sens cela a-t-il de prétendre que l’on respecte la liberté de pensée quand on hausse les épaules pour qualifier de « n’importe quoi » toute opinion simplement différente des nôtres . La réalité concrète révèle le plus souvent ou un conformisme mou (la passivité qui fait que certains adoptent les opinions ambiantes par faiblesse de personnalité), ou diktat autoritaire (le milieu imposant ses règles, ses croyances, ses choix etc. et interdisant toute opinion différente sous peine de mise à l’écart). Il ne faut pas sous-estimer non plus le conditionnement culturel qui nous fait regarder d’un mauvais œil une pensée étrangère à la nôtre. Pourtant, différent ne veut pas dire absurde.
Le drame avec des personnages tels que Mr Eric Zemour, c’est aussi d’interpréter la liberté de penser sous une forme irrationnelle, qui se borne par exemple à la seule provocation, histoire de se singulariser devant les autres et de montrer que soi-disant on « pense ». Je suis libre de penser ce que je veux devient alors les imbécillités de comptoir du genre : «moi je te dis que les noirs sont tous des fainéants et des délinquants», « moi je pense que l’on devrait chasser tous les arabes », « moi je te dis que l’on devrait guillotiner les pédés sans aucun procès »… Celui qui veut ainsi se distinguer le fait en affichant une opinion qu’il sait scandaleuse et il prétend « penser » davantage parce qu’il tourne en dérision les valeurs admises. Ce qui lui importe, c’est de se faire voir, de se faire remarquer et il obtient ainsi une reconnaissance par l’excentricité, par des opinions choquantes. Pour faire parler de soi, il faut provoquer, choquer, susciter l’émoi…
Il y a au sein de toute rédaction, ceux qui sont payés pour donner leur avis, et les autres, qui doivent se contenter de livrer “la meilleure version de la vérité” (selon la formule de Bob Woodward, le journaliste qui a révélé le scandale du Watergate). Malheureusement, les premiers sont souvent plus écoutés que les seconds. La majorité, l’opinion publique, consciemment ou non, préfèrera toujours écouter et répondre aux provocateurs. Les médias en mal d’audimat l’ont compris, et ils s’en servent très bien. Cependant, tout le monde n’a ni l’intelligence, ni la clairvoyance de discerner « opinion », et « vérité objective ». J’aimerais enfin qu’en France les choses soient claires et honnêtes vis-à-vis des auditeurs, des lecteurs ou téléspectateurs (On peut toujours rêver!).