Effet de Halo : Origine des clichés et des préjugés

Une lectrice de ce blog exprimait récement en commentaire sa frustration face à la perception qu’avaient d’elle la plupart des noirs qu’elle rencontrait. « J’arrive du Cameroun où je suis allée quelques mois.. dans un village traditionnel et j’ai été terriblement frustrée de voir à quel point, aujourd’hui les noirs que je croisais osaient croire que mon point de vue (de blanche) puisse être plus pertinent que le leur… »

Hier soir, je traînais sur Youtube quand je suis tombé sur une chanson camerounaise qui date de quelques années déjà. La chanson en question énonçait avec humour les différents stéréotypes que les groupes ethniques camerounais s’attribuent les uns les autres. Dans un pays où l’on décompte plus de 200 ethnies, il y a effectivement matière à raconter en matière de stéréotype. Il se dit par exemple que les Eton sont « agressifs », les Bamiléké « aiment l’argent », les Douala sont « fanfarons », les Bulu sont « bavards », les Bassa sont « méchants ». De plus, ces réflexions couplés à d’autres critères comme le sexe, ou l’âge et nourrissent les préjugés. Cette perception rigide et simplifiée d’un groupe ou d’une personne, nous l’avons tous plus ou moins à différentes niveaux : ethnique, régional, national, continental, ect. Ainsi, certains camerounais tiendront les Nigérians voisins pour des gens malhonnêtes, les français pour des péteux arrogants, les noirs nés en France pour des « perdus sans identité », les antillais pour des grosses feignasses et éternels assistés…

Nous  sommes bien souvent victimes des stéréotypes simplement basés sur notre apparence qui suppose une appartenance (réelle ou supposée) à une communauté. Bien que de prime à bord ces stéréotypes ne soient pas tout à fait vrais, ils peuvent facilement le devenir tant notre identité se développe et évolue sans cesse. Cela est d’autant plus vrai lorsqu’on a tendance à le brandir.

Les clichés peuvent parfois être positifs

Nous sommes tous d’accord pour reconnaitre que les clichés ont un énorme affect sur la façon dont nous traitons les gens. Ce n’est pas toujours pour le pire. Les stéréotypes positifs peuvent nous emmener à traiter certaines personnes avec plus de considération et de respect que d’autres. On en vient à supposer certaines personnes plus compétentes que d’autres, à avoir des attentes élevées envers des personnes haut placées sur l’échelle sociale. Un noir qui accomplit un exploit sportif fait “honneur” à tous les noirs. Une blanche dans un village africain devient la représentante de tous les Occidentaux. Une étude publiée dans un certain magazine concluait qu’une….. Certains clichés sont donc enviés tandis que d’autres sont évités. Cela conduit à la fois à des traitements positifs et négatifs de part et d’autre.

Mais pourquoi les gens ont-ils autant de préjugés ?

La première raison pour laquelle les gens se réfèreront aux clichés est qu’ils ne savent pas assez sur vous. La psychologie a montré que les gens sont moins susceptibles d’émettre des jugements stéréotypés envers vous s’ils vous connaissent personnellement. Alors, ils vont tenter de relier les pointillés, remplir les blancs du puzzle, grace à l’effet de Halo.

Le terme “Effet Halo” fut énoncé pour la première fois par E.L. Thorndike en 1920. Il avait constaté que le jugement des autres se basait sur une impression qui se répandait sur l’ensemble de la personne (avec une tendance au positif). Pour faire cour, l’effet de halo peut être expliqué en une phrase : entourez vous de belles choses, et ces choses déteindront sur vous.

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L’effet de halo est donc un biais cognitif faisant que l’estime que l’on a pour une personne ou une chose va être influencée par celle que l’on a pour ce qu’il y a « autour » dans notre système de représentations. Les professionnels du marketing l’ont compris et l’exploitent depuis longtemps. Exemples : Les gens qui possèdent un Mac sont plus créatif parce que Apple est une marque créative. Les femmes trouveront un homme plus beau et plus attirant s’il est à côté d’une voiture de luxe. Les grandes marques peuvent dépenser des milliards pour les J.O. mais ne sponsorisent pas ouvertement les actions humanitaires. Ce n’est pas par “méchanceté”, mais parce que l’effet halo serait destructeur.

De la même manière, on peut avoir une mauvaise opinion d’une personne que l’on ne connaît pas simplement parce qu’elle appartient à un groupe humain pour lequel on a une faible estime. Ou, l’inverse, avoir une mauvaise estime d’un groupe simplement parce que l’on a eu de mauvaises expériences avec l’un de ses membres. Bref, c’est une corrélation arbitraire, une forme de discrimination (positive ou négative). Ainsi donc, pour en revenir aux exemples de départ, l’Européenne qui débarque dans un village africain doit garder à l’esprit que la plupart des locaux n’ont aucune idée de qui elle est. Par conséquent, ils la traiteront en fonction de leur ressenti vis à vis de ce qui l’entoure (sa civilisation).

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Apprendre à voir au-delà des apparences…

Trop souvent, nous portons des jugements sans vraiment y penser. Il ya une théorie développementale qui explique comment les gens essaient toujours de ranger les choses en catégories, de les mettre dans des cases afin qu’elles soient plus faciles à comprendre. C’est un processus programmé dans nos cerveaux humains dès la naissance. Ainsi, chaque fois que nous rencontrons une personne, celle ci nous rappelle quelqu’un d’autre et instantanément, nous faisons l’association avec cette « connaissance » parce que nous n’en savons pas plus. Bien que nous ayons tendances à trier et ranger les gens dans des cases supprimer les halos nécessite un certain efffort.  Si une personne m’insulte et qu’elle est blanche, je peux lui en vouloir pour son insulte mais pas pour sa couleur de peau; et il serait encore plus absurde d’en vouloir à tous les blancs pour la seule faute de cette personne. À la limite, on pourrait même aller jusqu’à dire qu’haïr une personne entière pour la faute d’un seul de ses aspects ou d’une seule des situations qui l’impliquent, est un biais lié à l’effet de halo.

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Tout comme quand les gens se font une opinions rapide sur vous, vous devriez apprendre à mieux les connaître, car il ya beaucoup plus chez une personne que les premières impressions. Si vous ne voulez pas que les gens passent des jugements superficiels sur vous, alors vous devez essayer de votre mieux pour ne pas le faire sur les autres. C’est quelque chose de très difficile à faire ; surtout si tout le monde autour de vous use et abuse des stéréotypes. Vous devez faire l’effort de ne pas coller des étiquettes ou exclure des personnes de votre cercle alors que vous les connaissez à peine. Je sais qu’on ne peut pas être amis avec tout le monde, certaines personnes ne sont pas faites pour s’entendre entre elle, mais cela ne devrait pas être une raison de se montrer irrespectueux envers des inconnus. Ce n’est pas parce que vous ne vous ne vous entendez pas avec un ou plusieurs membres d’un groupe que vous ne pouvez pas être amis avec n’importe lequel de leurs autres amis.

Les amis et le cercle social que vous fréquentez, sont une énorme composante la vie. Ils façonneront votre personnalité. Alors ne les laissez pas dicter votre perception du monde.

2 Commentaires Effet de Halo : Origine des clichés et des préjugés

  1. faverger

    Merci pour ce billet ! C’est très intéressant et je n’avais pas envisagé la question sous cet angle. Cela suscite encore de nouvelles réflexions…

    Dans mon commentaire précédent, sous l’intitulé de ton billet « comment l’héritage de l’esclavage et de la colonisation affecte les noirs d’aujourd’hui », je faisais plutôt référence à ce qui existe encore et qui je crois affecte les noirs et les blancs. Je pensais aux rapports de domination actuels induis par des choix politiques guidés par l’économie et qui régissent les liens étroits qu’entretiennent les dirigeants français par exemple et les dirigeants (maintenus au pouvoir par des voies douteuses…) Camerounais, centrafricains… Le poids politique de ces alliances transpirent sur les populations… et notamment à travers l’éducation… Au Cameroun, on calque les programmes français… En France on n’apprend pas (ou sommairement) l’histoire de la colonisation… L’histoire des pays colonisés et indissociable de celles des colonisateurs… Un repentir éternel n’a certes, aucun intérêt mais une connaissance de l’histoire permet de remonter jusqu’à… aujourd’hui et de mesurer que le combat n’est pas terminé si on veut tendre à une égalité… Et qu’il est difficile parce qu’il sous tend à un ébranlement de toutes les sociétés, et notamment des sociétés occidentales tenues au sommet par les ressources qu’elles vont chercher chez les autres… l’héritage de l’esclavage et du colonialisme continue à régir de nombreux rapports… Moi je si je pars m’établir au Cameroun, je serais une expatriée… Si un Camerounais vient s’établir ici, ce sera un immigré…

    « Tant que les lions n’auront pas leurs propres historiens, les histoires de chasse continueront toujours de glorifier le chasseur », instruit un proverbe africain. Il est admis que la conscience historique, intimement liée à la mémoire, joue un rôle important dans la libération et l’élévation mentale d’un peuple. Que celui-ci puisse tirer une fierté suffisante de son passé, et il devient difficile de le dominer. Par conséquent, l’Occident et ses organes de presse ont toujours entrepris, et continuent à le faire, une vigoureuse politique de lavage de cerveau par une falsification de l’ histoire au détriment du peuple noir, dans le but évident de le maintenir dans l’asservissement ». Birame FALL

    Merci d’avoir pris le temps d’écrire un post qui ajoute évidemment d’autres dimensions à ces échanges… Voir au delà des apparences implique une rupture…

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